La « pratique à plusieurs »[1] est une pratique clinique institutionnelle sous-tendue par l’éthique de la psychanalyse. Elle consiste à mettre en place les moyens nécessaires pour que -pour chaque enfant - puisse se bâtir une institution sur mesure, en partenariat[2] avec les intervenants :

         La dimension relationnelle qui est au cœur de la « pratique à plusieurs » (ce dont la notion de « partenariat » rend compte) nécessite d’être « réglée ». En effet, une relation privilégiée peut aussi bien être un moteur du changement qu’un frein. À ce titre, la pratique à plusieurs implique une certaine « destitution » [3], c’est-à-dire « de se défaire de la croyance d’être le seul partenaire de l’enfant autiste, en ayant recours à d’autres partenaires, dans un jeu de permutation réglé, calculé et plein d’humour, mettant ainsi en mouvement une chaîne d’intérêts et de désirs. »[4].

         La réunion clinique hebdomadaire est un dispositif dans lequel chaque intervenant rend compte du travail entrepris quotidiennement avec un enfant en particulier. Toutefois ce n’est pas seulement l’occasion de faire le point sur les progrès et les impasses des enfants. Il ne s’agit pas d’objectiver l’enfant avec un savoir d’experts, mais plutôt de chercher ensemble ce qui fait difficulté pour l’enfant et de partager avec le reste de l’équipe les pistes trouvées par l’enfant lui-même ou par des intervenants pour aller au-delà de ces difficultés. De plus « la réunion a pour fonction d’opérer une séparation de chaque membre de l’équipe, chaque partenaire de l’enfant, avec le savoir qu’il croit avoir obtenu sur lui » (ibid., p.113).

         Dans certaines institutions, le responsable thérapeutique est celui qui est supposé savoir mieux que les autres ce qu’il conviendrait de faire avec les enfants. À l’Antenne, ce n’est pas le cas : le responsable thérapeutique a d’une part la fonction de garantir à chaque enfant et chaque intervenant qu’il y a une place pour sa singularité (ses désirs, ses compétences, etc.) ; d’autre part il veille à ce que l’objectif des stratégies thérapeutiques, pédagogiques et rééducatives soit toujours un mieux-être pour l’enfant. Autrement dit, il cherche à conjuguer la diversité des tactiques individuelles avec l’unité d’une stratégie commune.

         Les concepts élaborés dans le cadre de la psychanalyse sont des outils permettant de faire des hypothèses sur ce qui fait la difficulté de chacun des enfants (du point de vue de la particularité de leur rapport au corps, au langage et aux autres). De plus, l’éthique de la psychanalyse (avec la notion centrale de « sujet ») nous invite à considérer que si les exigences de l’entourage de l’enfant (la famille, les intervenants dans l’institution) doivent être entendues et respectées, l’enfant lui-même doit d’abord et avant tout être entendu dans son style propre et ses difficultés propres.